Billet d’actualité : le plan d’action issu des états généraux de la justice, un plan ambitieux a la hauteur des enjeux ?

Le 5 janvier 2023, le garde des Sceaux a présenté son plan d’action issu des Etats généraux de la justice. Ce plan d’action est issu d’un long processus de dialogue et de réflexion entre les citoyens et les services de la Chancellerie.

En effet, lancés le 18 octobre 2021, les Etats généraux ont permis à plus d’un million de contributions citoyennes (chiffre garde des sceaux) d’être déposées sur la plateforme participative parlonsjustice.fr.

Le résultat de ces contributions est sans appel : La justice est trop lente, la Justice est trop complexe. Et le garde des Sceaux de conclure dans son allocution du 5 janvier : « Il faut les entendre, et cela nous oblige ».

Alors, que retenir de ce Plan d’action ? Est-il à la hauteur des attentes ? Est-il capable de mettre un terme au « délabrement de la Justice » dont faisait état le 8 juillet 2022 le rapport Sauvé ?

Le 5 janvier 2023, le garde des Sceaux a présenté son plan d’action issu des Etats généraux de la justice. Ce plan d’action est issu d’un long processus de dialogue et de réflexion entre les citoyens et les services de la Chancellerie.

En effet, lancés le 18 octobre 2021, les Etats généraux ont permis à plus d’un million de contributions citoyennes (chiffre garde des sceaux) d’être déposées sur la plateforme participative parlonsjustice.fr.

Le résultat de ces contributions est sans appel : La justice est trop lente, la Justice est trop complexe. Et le garde des Sceaux de conclure dans son allocution du 5 janvier : « Il faut les entendre, et cela nous oblige ».

Alors, que retenir de ce Plan d’action ? Est-il à la hauteur des attentes ? Est-il capable de mettre un terme au « délabrement de la Justice » dont faisait état le 8 juillet 2022 le rapport Sauvé ?


Le Plan d’action repose sur huit secteurs de réforme :

  1. Les moyens humains et financiers ;
  2. Organisation nouvelle du ministère ;
  3. Les mesures novatrices en matière civile ;
  4. Les réformes de la justice prud’homale et économique ;
  5. La refonte de la procédure pénale ;
  6. La revalorisation des métiers de justice ;
  7. Des mesures en matière pénitentiaire ;
  8. Des mesures en matière de protection judiciaire de la jeunesse.

Attardons-nous sur quelques mesures clés qui pourraient impacter nos adhérents confrontés au monde judiciaire et nos pratiques à leurs côtés.

Tout d’abord, sur le budget de la Justice, l’augmentation de 8% par an des crédits alloués à la Justice se poursuit jusqu’à atteindre près de 11 milliards d’euros en 2027. En cumulé, sur le deuxième quinquennat Macron, le garde des sceaux annonce une hausse de 7,5 milliards d’euros en plus alloué à la Justice.

Ces moyens permettront entre autres de recruter et revaloriser les agents du ministère (magistrats, greffiers etc…), réaliser le plan de 15 000 places de prison, moderniser et agrandir les palais de justice en tenant compte de la transition énergétique, numériser la justice.

Sur les moyens humains, le Plan prévoit le recrutement de 10 000 agents dont 1500 magistrats (avec des profils nouveaux parmi lesquels des attachés d’administration, des enseignants en droit) et 1 500 greffiers.

Les magistrats devront être formés pour travailler en équipe et selon « la culture de l’amiable », soit vers un règlement des conflits à travers la conciliation des parties.

A cet égard, le garde des Sceaux souhaite réformer la justice civile et créer deux modes de règlements amiables : la césure et la procédure de règlement amiable. Autre angle d’attaque : la simplification des procédures (mode unique de saisine des juges, révision des délais en appel, amélioration de la structuration des écritures) ; l’objectif est pour le garde des Sceaux qu’ « au terme du quinquennat, les délais de procédure en matière civile soient divisés par deux ».

La révision de la procédure pénale est également un chantier important du Plan d’action. On le sait, le code de procédure pénale qui a été remanié à de multiples reprises est complexe et selon les termes du garde des Sceaux, il est « illisible, même pour les praticiens les plus expérimentés ».

Le Plan prévoit donc, à droit constant de réécrire différents articles, les regrouper, les réorganiser. Cette refonte sera pilotée par un comité scientifique de suivi des travaux composé de professionnels du droit.

Autres mesures phares : la réforme du statut de témoin assisté qui bénéficiera de nouveaux droits dont celui d’un droit d’appel étendu ; le remaniement de la procédure de comparution à délai différé ; l’élargissement du régime de perquisitions qui sera désormais autorisée pour certaines infractions la nuit, la simplification de la procédure de comparution immédiate; l’accompagnement et la mise en place de nouvelles mesures de protection pour les enfants victimes.

Enfin, le garde des Sceaux s’est engagé à raccourcir les délais de traitement des procédures. A la fin du quinquennat, en matière correctionnelle, un dossier pourrait être audiencé en 12 mois pour les dossiers les plus lourds et en 6 mois pour les COPJ (Convocation par Officiers de Police Judiciaire).

Concernant le champ pénitentiaire, la principale mesure est bien la construction de 15 000 places de prison d’ici 2027.

Enfin, un projet novateur est celui de la mise en place dès avril 2023 d’une application smartphone. Cet outil pourra permettre la géolocalisation de l’utilisateur afin que ce dernier localise le Point Justice le plus proche, ou trouve un avocat, un notaire.

A partir de 2024, une victime pourra demander par le biais de cette application une indemnisation devant le tribunal correctionnel ou une demande d’aide juridictionnelle. Cette application parait intéressante pour les justiciables mais il conviendra d’être attentif notamment en ce qui concerne l’orientation vers les professionnels du droit et le respect des règles de la concurrence et du libre choix de l’avocat.

Ce nouvel outil pourrait avoir des conséquences dans les pratiques de l’ASL.

Le chantier de la réforme de la Justice est immense. L’ambition l’est tout autant. Nous pouvons nous en être satisfaits. Toutefois, il ne faut pas s’y méprendre, les changements interviendront selon un calendrier qui, pour les mesures les plus emblématiques, est fixé à la fin de quinquennat c’est-à-dire 2027, soit dans quatre ans… et à condition que les engagements pris soient tenus et qu’ils ne soient pas compromis par des restrictions budgétaires ultérieures!

Nous prendrons part à cette refonte en apportant nos réflexions au garde des Sceaux que nous ne manquerons de rencontrer au cours de l’année 2023, comme le souhaite le Président Vincent Bouba

Maître Florence LEC
Docteur en Droit
Avocat-conseil national de l’ASL

Ces sujets peuvent également vous intéresser